Alain Troyas

Artiste peintre

Peintures abstraites

La réalité est une affaire aux sens multiples à laquelle la peinture abstraite apporte un sens profondément poétique, source d’un plaisir profond. Il est plaisant de s’arracher parfois aux thèmes de la réalité objective et de se livrer à penser l’impensable, de chercher les contours d’un pressentiment informulable, même si, et c’est peut-être là que réside la joie, la tâche est interminable et absurde. Qui, en effet, ne s’est jamais interrogé sur l’existence de forces universelles et de leur essence intime, des lois invisibles qui gouvernent le monde et spécialement de l’imaginaire ?

Si les réponses communes proposées sont souvent si incertaines et improuvables, la peinture abstraite peut prétendre y répondre dans le même registre d’indicibilité sans que ces improbabilités altèrent l’enchantement du questionnement. La pratique et la contemplation poétique du monde se satisfait volontiers de ne pouvoir représenter aucun objet concret tel qu’il se manifeste devant nos yeux, dans la mesure où l’on admet évidemment qu’est vaine la représentation de l’essence d’un phénomène. Échappant intentionnellement aux lois rationnelles limitant la pensée poétique, elle se contente de proposer des apparences, des échos, des images, des ouï-dire visuels, des illusions, des réminiscences, des langages intraduisibles, et pense que ces tentatives de les mettre au jour libèrent des émotions autant communes que secrètes, aussi obscures que lumineuses qu’il vaut la peine d’expérimenter et surtout de ressentir. Il y a en effet quelque chose du plaisir de l’exploration que la curiosité naturelle de l’esprit éprouve. L’inconnu doit se deviner, l’inconcevable doit se concevoir, l’impensé veut se penser. Un « déjà-vu » jamais vu, un pressentiment informulable, pense la peinture abstraite, peut se dévoiler, du moins partiellement, à travers des signes surgissant du fond d’un inconscient immémorial, comme venant un savoir antérieur dont on a aucune idée.

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